Il s’agit des “ Vers Dorés ” des pythagoriciens, l’une des rares traces écrites du pythagorisme. L’école de Pythagore était réellement une sorte de cloître monastique, où il ne fallait laisser entrer que des âmes pures. La règle du secret qui la liait est cause qu’il y a diverses incertitudes à son sujet.
L’époque tardive de ces deux livres (IIe-Ve siècle apr. J.-C.) ne doit pas nous porter à déprécier leur valeur. Ils sont tout ce qui nous reste d’authentique touchant l’un des plus grands hommes de l’antiquité. Hiéroclès assure « qu’ils sont la doctrine du corps entier des pythagoriciens et comme [le cri] de toutes leurs assemblées » . Il ajoute qu’il existait un usage qui ordonnait à tous les disciples le matin, en se levant, et le soir, en se couchant, de se faire réciter ces « Vers Dorés » comme autant d’oracles infaillibles que le Maître « Lui-même a dits ».
Les vers Dorés sont de véritables commandements d’une philosophie sacrée, qui faisait de la science une mystique, et de la mystique une science, et qui était, tout entière, dominée, guidée et couronnée par l’idée de Dieu, les « Vers Dorés » peuvent se résumer dans cette grande maxime : « La vie parfaite n’est et ne peut être qu’une imitation du parfait, c’est-à-dire du créateur ».
Les Vers Dorés de Pythagore
Honore en premier lieu les Dieux Immortels dans l’ordre qui leur fut assigné par la Loi.
Respecte le Serment.
Vénère ensuite les Héros glorifiés.
Vénère aussi les Génies terrestres, en accomplissant tout ce qui est conforme aux lois.
Adore aussi et ton père et ta mère et tes proches parents.
Entre les autres hommes, fais ton ami de celui qui excelle en vertu.
Cède toujours aux paroles de douceur et aux activités salutaires.
N’en viens jamais, pour une faute légère, à haïr ton ami, quand tu le peux : car le possible habite près du nécessaire.
Sache que ces choses sont ainsi, et accoutume-toi à dominer celles-ci : la gourmandise d’abord, le sommeil, la luxure et l’emportement.
Ne commets jamais aucune action dont tu puisses avoir honte, ni avec un autre, ni en ton particulier. Et, plus que tout, respecte-toi toi-même.
Pratique ensuite la justice en actes et en paroles.
Ne t’accoutume point à te comporter dans la moindre des choses sans réfléchir.
Mais souviens-toi que tous les hommes sont destinés à mourir ; et parviens à savoir tant acquérir que perdre les biens de la fortune.
À l’égard de tous les maux qu’ont à subir les hommes de par le fait des arrêts augustes du Destin, accepte-le comme le sort que tu as mérité ; supporte-les avec douceur et ne t’en fâche point.
Il te convient d’y remédier, dans la mesure que tu peux. Mais pense bien à ceci : que la Destinée épargne aux gens de bien la plupart de ces maux.
Beaucoup de discours, lâches ou généreux, tombent devant les hommes ; ne les accueille pas avec admiration, ne te permets pas de t’en écarter.
Mais si tu vois qu’on dit quelque chose de faux, supporte-le avec patience et douceur.
Quant à ce que je vais te dire, observe-le en toute circonstance.
Que jamais personne, ni par ses paroles ni par ses actions, ne puisse jamais t’induire à proférer ou à faire ce qui pour toi ne serait pas utile.
Réfléchis avant d’agir, afin de ne point faire des choses insensées, car c’est le propre d’un être malheureux de proférer ou de faire des choses insensées.
Ne fais donc jamais rien dont tu puisses avoir à t’affliger dans la suite.
N’entreprends jamais ce que tu ne connais pas ; mais apprends tout ce qu’il faut que tu saches, et tu passeras la vie la plus heureuse.
Il ne faut pas négliger la santé de ton corps, mais avec mesure lui accorder le boire, le manger, l’exercice, et j’appelle mesure ce qui jamais ne saurait t’incommoder.
Habitue-toi à une existence propre, simple ; et garde-toi de faire tout ce qui attire l’envie.
Ne fais pas de dépenses inutiles, comme ceux qui ignorent en quoi consiste le beau.
L’avarice non plus : la juste mesure est excellente en tout.
Ne prends jamais à tâche ce qui pourrait te nuire, et réfléchis avant d’agir.
Ne permets pas que le doux sommeil se glisse sous tes yeux, avant d’avoir examiné chacune des actions de ta journée.
En quoi ai-je fauté ? Qu’ai-je fait ? Qu’ai-je omis de ce qu’il me fallait faire ?
Commence par la première à toutes les parcourir.
Et ensuite, si tu trouves que tu as omis des fautes, gourmande-toi ; mais, si tu as bien agi, réjouis-toi.
Travaille à mettre ces préceptes en pratique, médite-les ; il faut que tu les aimes, et ils te mettront sur les traces de la vertu divine,
J’en jure par celui qui transmit à notre âme le sacré Quaternaire, source de la Nature dont le cours est éternel.
Mais ne commence pas à prendre à tâche une œuvre, sans demander aux Dieux de la parachever.
Quand tous ces préceptes te seront familiers, tu connaîtras la constitution des Dieux Immortels et des hommes mortels, tu sauras jusqu’à quel point les choses se séparent, et jusqu’à quel point elles se rassemblent.
Tu connaîtras aussi, dans la mesure de la Justice, que la Nature est en tout semblable à elle-même, de sorte que tu n’espéreras point l’interprétable, et que plus rien ne te sera caché.
Tu sauras encore que les hommes choisissent eux-mêmes et librement leurs maux, misérables qu’ils sont ; ils ne savent ni voir ni entendre les biens qui sont près d’eux.
Peu nombreux sont ceux qui ont appris à se libérer de leurs maux.
Tel est le sort qui trouble les esprits des mortels. Comme des cylindres, ils roulent ça et là, accablés de maux infinis.
Innée en eux, en effet, l’affligeante Discorde les accompagne et leur nuit sans qu’ils s’en aperçoivent ; il ne faut point la provoquer, mais la fuir en cédant.
Ô Zeus, notre père, tu délivrerais tous les hommes des maux nombreux qui les accablent, si tu montrais à tous de quel Génie ils se servent !
Mais toi, prends courage, puisque tu sais que la race des hommes est divine, et que la nature sacrée leur révèle ouvertement toutes choses.
Si elle te les découvre, tu viendras à bout de tout ce que je t’ai prescrit ; ayant guéri ton âme, tu la délivreras de ces maux.
Mais abstiens-toi des aliments dont nous avons parlé, en appliquant ton jugement à tout ce qui peut servir à purifier et à libérer ton âme.
Réfléchis sur chaque chose, en prenant pour cocher l’excellente Intelligence d’en haut.
Et si tu parviens, après avoir abandonné ton corps, dans le libre éther, tu seras dieu immortel, incorruptible, et à jamais affranchi de la mort.
« Les Vers Dorés » sont apocryphes et attribués à Pythagore (580 av. JC – 495 av JC), réformateur religieux, philosophe, mathématicien et thaumaturge grec. C’est un merveilleux bréviaire de Sagesse et de Bonheur. La traduction française du texte grec original, auquel le lecteur peut se rapporter, fut faite dans le souci constant de la stricte littéralité. Expression de la philosophie la plus parfaite des pythagoriciens, les Vers Dorés condensent leurs valeurs essentielles, sur lesquelles une inlassable méditation révélera leur extraordinaire valeur d’ascèse.